KABIG, LE DESTIN D'UN HABIT DE GRÈVES

livre KABIG, LE DESTIN D'UN HABIT DE GRÈVES
À l'origine vêtement de travail des goémoniers du Pays Pagan dans le Finistère, le kabig est peu à peu devenu le vêtement emblématique des bretons. Se pencher sur l'histoire du kabig c'est aussi découvrir l'histoire culturelle de la Bretagne.

Nous vous faisons découvrir un ouvrage dédié à l'histoire du kabig, ce manteau de travail des goémoniers devenu emblématique de la culture et de l'esprit breton.
Mais d'où vient son nom ?
Kab signifie manteau en breton. Le kabig était appelé "kab an od", manteau de grèves ou "kab gwenn", manteau blanc. Le terme "kabig", petit manteau a été définitivement adopté dans la seconde moitié du XXe siècle pour désigner ce vêtement historique.

LES AUTEURS

Éditions Coop Breizh, 2020

Pascal Aumasson
Ancien conservateur de musées bretons, il avait organisé l'exposition " Kabig, le destin d'un habit de grèves" au port-musée de Douarnenez, en 2008.

Yannick Bigouin
Ancien directeur de l'Écomusée des goémoniers et de l'algue de Plouguerneau, il est l’auteur de Nous te faisons [autrement] Bretagne (Yoran Embanner, 2017)

Gwenaël Le Berre
Tisserand et plasticien bigouden, il a initié et participé aux montages des expositions " Kabig, le destin d'un habit de grèves" au port-musée de Douarnenez, en 2008 et “De sardines en dentelles" à Pennmarc'h en 2003.
Il archive également le travail de son père, le Seiz Breur Marc Le Berre.

RÉSUMÉ

" Kabig, le destin d'un habit de grèves" retrace l'histoire du kabig de ses débuts à nos jours.

Le kabig est un court manteau à capuche, en drap de laine, possédant une poche ventrale et des cabillots (petite cheville en bois munie d’un cordage) en guise de boutons, comme sur les duffle-coats.

Né dans le Finistère, sur le territoire restreint et isolé que constitue le Pays Pagan, le kabig était le costume de travail des goémoniers. Ces paysans marins, très pauvres, vivaient sur la côte et pêchaient ou ramassaient le goémon, les algues, seule manière de subsister dans ce territoire éloigné des grandes voies de circulation et à la terre aride, presque impropre à l'agriculture.

La première évocation de ce vêtement fut faite par l'écrivain anglais Adolphus Trollope dans ses notes lors d’un voyage en Bretagne en 1839. Sa première représentation visuelle date de l’été 1844. Le dessinateur François Hippolyte Lalaisse, en vacances en Bretagne, consigna à l’aquarelle tous les costumes régionaux croisés pendant son voyage. Ce Kab an aod ou cape de grève était taillé dans une étoffe blanche au liseré rouge et bleu. La couleur blanche servait à repérer les goémoniers au milieu des rochers, ainsi que ceux qui étaient tombés à la mer.

L’aquarelle de Lalaisse fut reprise sous forme d’estampes et de gravures dans des ouvrages sur les costumes folkloriques. C’est ainsi qu’en 1849, les costumiers de l’opéra de Paris s'en inspirèrent pour créer les costumes des acteurs d’un opéra dont l’action se déroulait à Pornic.
Ce costume traditionnel devint ainsi la représentation d’un vêtement marin générique. Revisité dans une vision romantique par les artistes de la fin du XIXe siècle, il représentait l’imaginaire de la Bretagne : un vêtement exotique et pittoresque porté par des habitants rudes voire sauvages.

Bien que lié à une minuscule région enclavée en Bretagne, le kabig originel était confectionné dans un drap de laine tissé dans la Drôme. Le liseré bleu et blanc si caractéristique de ce manteau était la marque de fabrique des établissements Morin de la ville de Dieulefit. Disposant d’un solide réseau commercial, cette entreprise put exporter jusqu’au Finistère son drap de laine solide, chaud. Son tissage serré le rendait imperméable ce qui séduisit cette petite paysannerie maritime. Cette étoffe était idéale pour la confection d’un habit de grèves destiné à protéger les travailleurs des intempéries et du froid.

Photographie de Jos Le Doaré pour une réclame Le Minor, 1952

L’essor des stations balnéaires à partir de 1894, désenclava le pays Pagan. La bourgeoisie bretonne découvrit le kabig. Séduite par ses caractéristiques, elle s’en empara, continuant à le porter au retour des vacances et participant ainsi à sa diffusion.

Le kabig dépassa sa folklorisation durant l’Entre-Deux-Guerres. Créé en 1923, le mouvement artistique Seiz Breur s’attacha à œuvrer pour une renaissance culturelle bretonne. Dans ce cadre, le dessinateur ethnologue René-Yves Creston et le tailleur quimpérois Marc Le Berre travaillèrent à la modernisation du kabig.

Il connut son apogée entre les années 50 et 70.
D’abord au cinéma, dans le film Dieu a besoin des hommes, primé au festival de Venise en 1950. Les acteurs parisiens continuèrent de porter le kabig à la ville après le tournage.
Il devint ensuite une référence mode grâce à Le Minor. En jouant sur l’aspect authentique de cette pièce et en rappelant ses origines modestes, notre maison produisit le kabig à grande échelle, le faisant connaître au-delà des frontières bretonnes grâce à des campagnes de publicité modernes. Le Minor modernisa ce vêtement de travail en variant les formes, les ornementations et les couleurs. Cette diffusion massive allait de pair avec la renaissance culturelle bretonne. Les bagadoù, ensembles musicaux bretons s’approprièrent le kabig. Conscients qu’une formation musicale a un air plus prestigieux en portant un uniforme, les musiciens adoptèrent naturellement le kabig. Chaud, imperméable, plus pratique que les costumes traditionnels d’apparat, il restait un vêtement simple à fabriquer et bon marché. Ainsi porté par une jeunesse libre et indépendante aussi bien en Bretagne que dans les autres régions de France, le kabig se diffusa sur l’ensemble du territoire avant d’être redécouvert dans les années 80 par des stylistes de renommée mondiale comme Val Piriou.

AU COEUR DE L'OEUVRE

Bien plus qu’une approche historique, cet ouvrage a une vocation ethnographique en se penchant sur le kabig d’un point de vue culturel et anthropologique. Toutes les dimensions sociales liées au port du kabig sont évoquées : aspects géographiques, religieux, psychologiques, linguistiques…

Le propos bien qu’érudit et savamment documenté reste clair, simple et lisible, à la portée de tous. Nous avons particulièrement apprécié les témoignages des acteurs de la renaissance du kabig, collectés par les auteurs. Comprendre les aspirations et les motivations de ceux qui dans la seconde partie du XXe siècle ont porté le kabig comme un étendard humanise le propos. Au-delà des mouvements de l’Histoire, on découvre la simplicité et l’authenticité d’un vêtement du quotidien.
Tout au long de ses 128 pages, le texte est ponctué d’archives inédites : anciennes réclames Le Minor, gravures du XIXe siècles, dessins de stylistes, affiches, photos personnelles etc. qui enrichissent l’ouvrage et permettent une meilleure immersion dans cette épopée.

Le chapitre consacré à Le Minor propose une plongée inédite dans l’histoire de notre maison. De la fabrication de poupées présentant les costumes traditionnels bretons au développement de nos lignes de prêt-à-porter, le kabig incarne l’évolution de notre maison. Ce chapitre met en valeur l’excellence de notre savoir-faire séculaire, notre attachement au patrimoine breton et à l’innovation textile. C’est en puisant dans ces racines et en exploitant nos archives, que nous sommes en mesure de proposer à nouveau le kabig dans nos collections dès l’hiver 2022.

Plus que l’histoire d’un vêtement, ce livre est une plongée dans l’âme bretonne et son identité culturelle, loin des clichés et du folklore. Cet ouvrage séduira non seulement les bretons et les amoureux de la Bretagne, mais également les passionnés de savoir-faire, de patrimoine et les amoureux du textile.

 

 

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